Рибаківка - ОдесаRybakivka - Odessa
Nous avons traversé l'Ukraine
(et c'est pas petit)
+ un peu de panique
Samedi 07 août 2021
Il y a eu beaucoup d'espoirs exaucés mais aussi un peu de nos pires craintes réalisées aujourd'hui. Spoiler alert (pour nos mamans): ça finit pas trop mal quand même. En tout cas, on devrait se souvenir de cette journée pendant quelques temps.

Nous commençons à 10h30 car il n'y a que 78km à faire et que la météo annonce des orages dans la matinée. En fait, ils dureront jusque midi et nous partons donc sous la pluie. Généralement, nous ne sommes pas friands de pluie mais là ça fait 7 semaines que nous crevons à 35°C et nous accueillons donc la pluie et les longs orages qui font redescendre la température à 22°C, à bras ouverts. C'est carrément agréable et en plus ça nettoie un peu la poussière qui s'accumule sur les bagages. La propriétaire nous prend en photo, inquiète de nous voir partir avec cette météo.
Donc ça commence super bien. Nous longeons la mer Noire et comme il y a pas mal de falaises, de temps en temps ça grimpe un peu.
Au km 11, il y a un détour de 6km à faire pour contourner un estuaire. Nous choisissons néanmoins l'autre option qui est de traverser une plage sur un kilomètre. Les trois quarts de la bande de sable sont aménagés en camping et on peut y rouler sans trop de souci. Par contre, la fin c'est du sable mou et il faut pousser et avec un vélo de 70kg c'est laborieux. Mais ça passe.

Vers midi, la pluie et les orages ont cessé mais un vent violent s'est levé. C'est un vent de côté, le plus désagréable parce qu'il nous fait ralentir autant qu'un vent de face mais en plus il nous fait perdre l'équilibre au gré des rafales (et surtout des dépassements par des véhicules trop rapprochés) et provoque pas mal de zigzags. C'est d'ailleurs au moment où le vent est le plus fort que nous nous retrouvons sur une étroite nationale avec un flux continu de véhicules dans les deux sens (pas assez de véhicules pour créer un ralentissement cependant). Si le conducteur ukrainien est généralement bien luné et roule de manière considérée, il faut bien reconnaître qu'il a du mal à ralentir pour un cycliste. Donc dans n'importe quelles conditions, il faut doubler quitte à frôler, s'il n'y a pas assez de place (ça évite de perdre 2-3 secondes à ralentir).
Tous ces facteurs cumulés nous ont fait passer probablement les six kilomètres les plus anxiogènes de notre carrière de cyclotouristes (et pourtant nous avons pratiqué des autoroutes en France et en Corée). Quand on s'arrêtera un peu plus loin pour décompresser, on se rendra compte que nous avons perdu notre drapeau et notre éolienne qui nous accompagnaient depuis plus d'un an!

Le vent sera violent pendant environ deux heures et ensuite nous serons dans des zones boisées puis dans des zones urbaines donc ce sera globalement protégé. Nous arriverons à ОдесаOdessa vers 17h30. L'arrivée s'effectue par un énorme axe routier de 2*4 voies. Le genre qu'on aurait évité dans d'autres pays, mais ici, on les prend tout le temps. On est à peu près sûr que le revêtement est pratiquable et les voies sont larges, il y a souvent une voie pour les bus, on y est à l'aise en fait.
Par contre, à notre arrivée Sandrine s'aperçoit qu'elle n'a plus son sac! En réfléchissant, on comprend assez vite qu'elle l'aurait oublié lors de notre dernière pause, il y a 18km. On a pris une boisson et une glace sur un banc devant une épicerie en bordure de route. Dans le sac, nos deux porte-feuilles, avec nos deux cartes bleues, nos passeports, permis de conduire et une partie du loyer pour notre appartement de ce soir et des trois semaines à venir (420€). Rien que ça.

Donc notre après-midi fut assez différente de ce que nous avions anticipé. Nous n'avions pas d'argent pour payer l'appart' ou à manger ou un taxi. Heureusement, la propriétaire compréhensive nous a laissé entrer dans l'appartement en attendant que nous réglions nos histoires. On a pu déposer les bagages et le vélo. Nous avons une application sur nos téléphones pour faire appel à des taxis dans les villes et notre carte de crédit y est préenregistrée. Donc une heure plus tard nous sommes de retour à l'épicerie, en taxi.
Le sac n'est pas sur le banc et l'épicière ne l'a pas. Ça commence mal. Personne ne parle anglais (même ukrainien c'est compliqué). Alors on se débrouille. Il s'avère que l'épicerie est dotée de pas mal de caméras de surveillance fonctionnelles. Nous savons exactement à quelle heure nous sommes passés (car nous avons échangé des messages avec notre propriétaire au moment de la pause). Et assez vite, nous avons des images de la personne qui a "récupéré" notre sac.
Il y a beaucoup de monde qui gravite autour de l'épicerie qui fait également bar. Nous avons aussi appelé un copain qui est à l'autre bout du pays mais qui parle anglais. Il appelle la police pour nous et nous dit de l'attendre sur place.

Pendant ce temps, un client retrouve notre sac caché derrière une poubelle dans un coin sombre de la terrasse (nous avions fouillé les poubelles mais pas derrière). Première vague de soulagement: les papiers y sont et il reste même une carte de crédit. Il manque donc l'argent (logique) et mon porte-feuille (donc ma carte bleue, ma carte vitale, ma carte d'assurance européenne, mon suivi vaccinatoire français (pas celui du Covid), entre autre). Déjà nous n'aurons pas de problèmes avec les douanes et nous pourrons manger dans les jours qui viennent...
La police arrivera assez rapidement. On leur expliquera tant bien que mal la situation. Avec les vidéos et les témoignages des gens sur place, ils ont une bonne idée de la personne qui a mon porte-feuille et ils partent le chercher... en vain. Nous attendons deux heures et quand ils reviennent ils ne l'ont pas trouvé. Ils prennent alors notre déposition et notre contact (si jamais).

Il fait désormais nuit (ici le soleil se couche à 20h30) et nous sommes loin de tout, mais nous trouvons tout de même un taxi qui nous ramène à notre nouvelle maison. Il est 22h, nous allons retirer de l'argent de nouveau (il faut encore payer le loyer), nous achetons une salade car nous n'avons toujours pas mangé. Et enfin une douche (parce que 80km de vélo tout de même) et au lit.
Bilan de la journée: nous avons baroudé à travers toute l'Ukraine (sauf les zones en guerre malheureusement) sur près de 2200km. C'est le pays où nos rencontres furent les plus incroyables. Même si les routes sont pourries et nous avons déjà flingué notre roue arrière, la cohabitation avec les motorisés est plutôt sereine (à part un petit peu aujourd'hui). Nous sommes au Sud du pays et nous ne savons pas encore où nous allons aller ensuite mais une chose est sûre nous allons nous reposer trois semaines à ОдесаOdessa.
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